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2002

Mont Valérien

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Monument à la mémoire des résistants et otages
fusillés au Mont Valérien entre 1941 et 1944.
Mémorial de la France combattante, Suresnes.

0506

Cloche, Bronze, diamètre : 2700 mm - Hauteur : 2180 mm

Pascal Convert
Art/Entreprise
Fonderie Paccard

Maître d’ouvrage :
Ministère de la Défense
Direction de la Mémoire, du Patrimoine et des Archives
Sous-direction du Patrimoine
Bureau des Monuments Historiques et des Lieux de Mémoire

 

La mémoire des fusillés du mont Valérien

Le 12 juin 1997, Robert Badinter, sénateur des Hauts-de-Seine, dépose une proposition de loi « relative à l’édification d’un monument au mont Valérien portant le nom des résistants et des otages fusillés dans les lieux de 1940 à 1944. »
Pour donner suite à cette proposition, un arrêté du 3 mars 1998 du secrétaire d’État à la Défense chargé des Anciens Combattants a créé une commission en vue de rendre hommage aux fusillés.
Cette commission a considéré qu’il convenait en priorité d’établir la liste la plus exhaustive possible des fusillés. Elle a constitué un groupe de travail composé d’historiens chargés de procéder aux recherches nécessaires qui ont abouti en novembre 1999.
Dans le même temps, la commission a réfléchi à l’emplacement du monument et à son aspect. Elle a proposé que cette œuvre soit installée face à la chapelle où étaient enfermés les condamnés avant d’être conduits sur le lieu de leur exécution.
Estimant qu’une liste exhaustive des victimes ne pourra sans doute jamais être établie, elle a souhaité que la dédicace suivante soit inscrite sur le monument : « Aux résistants et aux otages fusillés au mont Valérien par les troupes nazies 1941-1944 », complétée par la mention « et à tous ceux qui n’ont pas été identifiés ».

 

Pascal Convert - Texte du concours

L’enjeu symbolique, et intimidant, de la tâche proposée exige une justesse sans effets, une forme puissante et discrète.

Une cloche...

Il s’agit de produire un signe symbolique culturel simple, accessible, ouvert. Immédiatement reconnaissable, tirant sa force de sa structure, en même temps repliée sur elle-même et d’emblée rattachée aux événements collectifs, une cloche est un objet de civilisation (1).

Monument sans être architecture, une cloche est dotée d’une puissance de signification civilisatrice, au sens le plus large du terme, qui a d’ailleurs été convoquée, pour ne parler que du XXe siècle et de l’Occident, durant les deux dernières Guerres Mondiales. Je fais référence ici aux cloches réalisées pour honorer les combattants, après 1914-1918, et à la cloche dédiée aux déportées de Buchenwald, étant, bien entendu, que c’est comme signe laïque, hors de toute considération religieuse, que cet objet collectif m’intéresse. Que c’est dans sa capacité, en regroupant tous les noms sur une forme unique, à évoquer une communauté de pensée et d’acte qu’elle trouve sa raison d’être.

... intégrée dans le site ...

Compacte et sobre, elle laisse le plus possible le site intact, et s’y intègre. Le choix de son emplacement l’insère dans l’espace simplement, en centrant sa forme ronde dans un carré au sol, et la met en relation avec l’environnement naturel : scellée dans l’herbe, elle en tire tout ensemble son caractère de tombeau et sa vitalité.

Par ailleurs, il ne s’agit pas littéralement d’une cloche mais de la reproduction d’un moule de cloche, ce qui lui confère formellement une ouverture signifiante. Et, devant son rideau de verdure, elle est à la fois forme matricielle et forme évocatrice d’arbre coupé, puissance de résistance et force coupée net.

... où s’inscrivent les noms ...

Le bronze sombre de la cloche constitue le support de deuil où viennent s’inscrire les mille quinze noms des résistants exécutés au Mont Valérien.

Un espace est laissé libre sur l’anneau situé à la base de la cloche. Il est là pour les résistantes exécutées en d’autres lieux, pour les résistants non encore identifiés, en attente de l’inscription de leur nom ou de la mention de leur absence.

Mais l’essentiel est que cette inscription des noms soit une mise en lumière : le relief des caractères émergeant du bronze verra sa surface polie, et lumineuse.

« Un grand soleil d’hiver éclaire la colline... » (2)

1 - L’art campanaire n’a pas été inventé par la civilisation occidentale mais trouve son origine dès la plus haute Antiquité en Anatolie, en Égypte et en Chine. Les découvertes des ensembles harmonisés dans la province du Hubei, en Chine, ont permis de mieux comprendre cet art et d’élargir sa définition souvent réduite aux cloches des églises pour l’Occident et des temples pour l’Orient. Si l’on dépasse ces critères simplificateurs, l’art campanaire, science des symboles d’identité, ouvre des perspectives sur un univers beaucoup plus vaste qu’on ne l’imagine habituellement : il assure la protection d’un groupe, témoigne de son existence, permet son identification. L’art campanaire traversera toutes les civilisations, toutes les cultures, ce sont des objets d’appel, de rassemblement, de communauté.

2 - Louis Aragon, Le Roman inachevé (écrit à la mémoire du groupe Manouchian exécuté par la Gestapo le 21 février 1944). Ce poème est chanté par Léo Ferré sous le titre l’Affiche Rouge.

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