pascalconvert

2017

Revue de presse et projet pour la Biennale de Venise 2017

RESSUCITER LES BOUDDHAS DE BAMIYAN

Pascal Convert devant les bouddhas de Bâmiyân


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Rue89 Bordeaux, le 18 juillet 2016

www.rue89bordeaux.com

Rue89Bordeaux

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Artpress 434, le 3 mai 2016
par Catherine Millet

www.artpresse.com
Sélection officielle pour la Biennale de l’Entertainment de Venise

Petit bouddha de Bâmiyan

Autrefois, un commissaire, nommé pour ses compétences, était chargé de choisir le ou les artistes qui représenteraient la France dans le pavillon national à la Biennale de Venise. Ce choix avait le poids de l’engagement du commissaire et de la confiance du pays dans le ou les artistes dont il s’honorait de la reconnaissance sur la scène internationale.

Jusqu’au jour où la République, jugeant sans doute que le processus n’était pas suffisamment démocratique et retrouvant des réflexes de 1793, décida que c’en était assez des têtes qui dépassaient, qu’il fallait les couper, et instaura une commission de sélection renouvelable à la place du commissaire autocrate. Il arriva que cette commission désigne des artistes qui, si l’on peut dire les choses ainsi, s’imposaient par l’importance de leur oeuvre: Fabrice Hyber, Annette Messager, Christian Boltanski, Sophie Calle… Il arriva aussi qu’elle tombe dans le travers qui menace toute commission, celui de ne se mettre d’accord ni sur le meilleur, ni sur le pire, mais sur le plus moyen.

Et puis la République, désormais aux mains des diplômés en «management culturel», décida que des artistes élus sur la seule base de leur oeuvre accomplie, c’en était encore trop, que celle-ci comptait pour de la vase de lagune, qu’il fallait éradiquer ce résidu d’élitisme, et inventa donc le concours Lépine du pavillon de Venise. Les artistes sont désormais priés de postuler en constituant un dossier comme tout candidat à une bourse ou un stage, et de proposer un projet. Un jury jugera. Un vrai artiste, aussi torturé soit-il par le doute, est aussi quelqu’un conscient de la valeur de son travail et peut trouver quelque peu humiliant, on en conviendra, de se mettre dans cette position. C’est ce que deux commissaires et critiques, Nicolas Bourriaud et Éric Troncy, ont voulu dénoncer en prenant l’initiative de proposer que, pour la Biennale 2017, le pavillon soit confié à Bertrand Lavier, sans que celui-ci élabore le moindre projet. Pas sûr que leur ironie ait plu aux managers. Ce ne sont pas des gens qui apprécient l’inconnu.

Ce n’est pas tout. Le règlement du concours stipule que le postulant à la gloire nationale doit apporter la preuve de sa «capacité à associer des partenaires financiers ou logistiques extérieurs». Autrement dit, le pays veut bien le désigner comme son représentant à condition… qu’il paye pour ça. Les caisses de l’État étant présentement ce qu’elles sont, plus le projet sera soutenu par de puissants marchands et mécènes, plus il aura des chances d’être considéré. Aux fameuses catégories du jugement esthétique de Kant, ajoutons désormais : le pognon.

Le jury est censé retenir trois projets qui sont présentés au ministre des affaires étrangères et au ministre de la culture(1) auxquels revient le choix final. Cette année, le jury n’avait retenu que deux propositions, celle de Pascal Convert, environnement et sculptures de verre élaborées à partir des Bouddhas de Bâmiyan détruits en 2001 par les talibans(2), et celle de Xavier Veilhan, Merzbau musical, qui transforme le pavillon en salle de concerts (chorales locales et stars internationales nous annonce-t-on). L’un, donc, qui affronte le réel, l’Histoire, l’autre, selon le mot même de l’artiste, «festif»(3). Jean-Marc Ayrault et Audrey Azoulay, tous deux bien connus pour leur connaissance de l’art contemporain, ont tranché : ce sera Veilhan.

(1) Le ministère de la Culture et de la Communication, le ministère des Affaires étrangères et du Développement international et l’Institut français, sont les «opérateurs» du Pavillon français.
(2) Voir Le Monde du 25.04.2016 et Télérama du 30.04.2016. L’artiste travaille avec le soutien de l’ambassade de France à Kaboul.
(3) Voir le Quotidien de l’art du 02.05.2016 

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Le Monde, le 25 avril 2016

www.lemonde.fr

Le Monde Architecture

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Télérama, le 30 avril 2016

www.telerama.fr

Télérama

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TV5 Monde, le 1er mai 2016

www.tv5monde.fr

TV5 Monde

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Le Monde, le 1er mai 2016

www.lemonde.fr

Le Monde Architecture

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Publié sur l'Humanité.fr, le 1er mai 2016
Pascal Convert et la nécessité de donner présence à l’absence

www.humanite.fr

Parti en Afghanistan pour réfléchir à une oeuvre inspirée par la destruction des bouddhas de Bâniyân, voila quinze ans,
le plasticien est revenu plein de projets utilisant poésie et high tech. A suivre…
L’artiste nous a autorisés à publier des images inédites de son travail en cours.

Pascal Convert rentre d’Afghanistan. Il était invité par l’ambassade de France et l’Institut français à réfléchir à un projet artistique à l’occasion du quinzième anniversaire de la destruction, par les djihadistes, des bouddhas de Bâmyân. Il est rentré la tête pleine de projets. Dans l’un d’entre eux, pensé pour la Biennale de Venise 2017, l’artiste explique qu’à l’époque, le monde occidental n’a pas complètement pris la mesure de cet évènement qui, pourtant, s’inscrit dans une chronologie conduisant à la destruction des deux tours géantes de New York, sept mois plus tard exactement, le 11 septembre 2001 ». Pour lui, ces destructions « nous ont appris que le retour des conflits culturels, économiques et surtout religieux irait de pair avec une utilisation toxique de la puissance de synchronicité des images ».  
« Deux Bouddhas géants, deux tours géantes ». Pour l’artiste, une correspondance sensible s’établit entre les deux niches vides de Bâmiyân et les empreintes négatives des Twin Towers du Mémorial de New York.  « Prise dans une double figure gémellaire en miroir, la conscience du spectateur est médusée et reste enfermée dans une forme aiguë de présent, hors de l’histoire. L’objectif premier de « l’épuration culturelle » menée par les extrémistes islamistes n’est autre que de nous faire littéralement perdre la mémoire. Et avec elle, notre conscience » analyse-t-il  après avoir vu les voutes des sanctuaires maculées de noir de fumée et frappées d’empreintes de chaussures, pour mieux avilir l’ennemi. Pour lui, leur absence même rend ces traces encore plus puissantes. La violence de l’Histoire, qui a fait près de 3000 morts à New York, assassiné 300 civils Hazaras sur place, et on ne sait combien de milliers de civils afghans durant le régime de Talibans, s’inscrit en creux ». 

A la fin de la semaine dernière, les ministres des affaires étrangères et de la culture qui, de vingt quatre au départ, ne comptaient plus que deux artistes dans leur « short list », Pascal Convert sous le commissariat de Georges Didi-Huberman et Xavier Veilhan sous le commissariat de Lionel Bovier, ont tranché : Ont-ils pris peur face à la vision et à la profondeur de pareil projet qui met les pieds dans le plat des problèmes de politique étrangère et de migrations? Ils ont choisi Xavier Veilhan pour représenter la France à la 57° Biennale internationale d’Art Contemporain de Venise, qui se tiendra du 13 mai au 26 novembre 2017.   C’est un rhinocéros rouge qui a fait connaître le lauréat, ancien night cluber, qui se définit lui-même comme « un artiste de la surface » s’intéressant « aux signes extérieurs, à la mode et à une certaine futilité » et qui émet le désir d’être « transparent ». Si l’on en croit « Le Journal du Dimanche » qui, pour désigner son projet « Merzbau Musical », écrit qu’il consiste en « une installation dans tout le Pavillon français, animée par des musiciens de tous horizons », son vœux sera exhaussé. 

Quant aux bouddhas de Bâmiyân, en Afghanistan, c’est un peu leur deuxième mort. Car ce sont eux qui sont au centre du projet que présentait le plasticien Pascal Convert, connu, lui, pour avoir créé le mémorial  en hommage aux fusillés du Mont Valérien, dont la cloche évoque le tocsin au mort, ou aux Archives nationales, un damier aléatoire de plaques de verre lumineuses incitant à une déambulation mémorielle en vis-à-vis avec Jean Moulin, Marie Curie, Louise Michel, Jean-Pierre Timbaud ou avec les visages d’inconnus, de Roms, saisis par l’identité judiciaire… En attendant de pouvoir, un jour, poser à Venise, à mi-chemin entre New York et Bâmyân, deux blocs parallélépipédiques reprenant  les niches des deux bouddhas gisant, tels des fantômes, sous une masse de verre, Pascal Convert réfléchit à d’autres œuvres. Pour se rendre utile sur place, il veut refaire deux gisants de verre dans leurs niches, comme des tombes. La collecte d’images réalisées grâce à des drônes sera utile à la communauté scientifique. Quant au scanner total réalisé grâce à un appareil robotisé de la société Iconem, il nous immergera dans le grès de cette falaise de 1,5 kms de long, en préservant la mémoire. Autant dire qu’on n’a pas fini d’entendre parler des Bouddhas de Bâmiyân… 

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Publié sur La Matinale, le 19 octobre 2017
FIAC : « Les exactions des talibans, les casseurs de pierre et coupeurs de têtes, ce n’est pas fun »



PL’œuvre de Pascal Convert montrant le site afghan de Bamiyan dynamité en 2001 ne cadre pas
« Avec les grandes fêtes de l’art » – dont la Foire internationale d’art contemporain, qui l’a refusée –, regrette, dans sa chronique, Michel Guerrin, rédacteur en chef au « Monde ».

Chronique.

Non, le budget 2018 n’a pas été conçu pour faire plaisir aux riches, martèle le gouvernement depuis l’ouverture du débat à l’Assemblée. Nous verrons ce qui restera de l’impôt sur la fortune. Sans doute seront surtaxés les acheteurs de Ferrari, de yachts ou de jets privés. Pas ceux d’œuvres d’art. Le ministre du budget, Gérald Darmanin, a expliqué pourquoi, en improvisant une frontière entre « les produits ostentatoires » propres à contenter les très riches, et ceux qui sont « productifs pour l’économie ». Le problème, c’est que l’ostentatoire n’est pas vraiment étranger à un art contemporain mondialisé qui tutoie l’argent roi – Jeff Koons, Takashi Murakami, Damien Hirst et quelques autres. Cet univers « sans foi ni loi » est fort bien décrit par Jean-Gabriel Fredet dans son livre Requins, caniches et autres mystificateurs (Albin Michel, 368 pages, 22 euros), salué hier dans Le Monde par notre confrère Harry Bellet. C’est en constatant ce spectacle, animé par la spéculation, quelques prix stratosphériques, ou par la surenchère dans la provocation, du genre quand est installé en 2014 un « plug anal » géant de l’artiste américain Paul McCarthy sur la place Vendôme, lieu symbolique de l’argent, que des voix s’élèvent régulièrement pour demander que les œuvres d’art soient prises en compte dans l’impôt sur la fortune. Mais elles y échappent depuis des années. Car le jeu de rôle est joué d’avance.

99 % des transactions sont modestes.

Déjà, le débat budgétaire coïncide toujours avec la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), qui a lieu jusqu’au 22 octobre à Paris . Pas le moment de gâcher la fête. Et puis les spécialistes vous expliquent qu’il serait contre-productif de pénaliser l’amateur d’art, tant la vision que nous en avons est déformée. La lumière est toujours focalisée sur une poignée de prix fous alors que 99 % des transactions sont modestes. Ce serait toute la chaîne vertueuse de l’art en France , de l’artiste au mécène, en passant par le musée, qui se trouverait fragilisée par la taxation. Plus largement, comment distinguer le spéculateur du passionné ? En allant à la FIAC, qui offre une instructive cartographie de l’art actuel. Avec quelques œuvres ostentatoires et beaucoup qui n’en sont pas. Ça ne veut pas dire qu’elles sont bonnes. Elles peuvent même être médiocres. A chacun de se faire son avis, d’autant que ce qui compte dans une foire marchande, ce n’est pas la qualité des œuvres mais l’intensité des transactions. Vous n’échapperez pas à des tableaux, sculptures ou photos colorés qui visent à décorer le salon. A d’autres œuvres qui ont pour ambition d’interroger l’époque et alimenter la discussion. Vous prendrez aussi la mesure d’une ambiguïté évoquée dans le film suédois The Square, Palme d’or au dernier Festival de Cannes , à voir actuellement en salle. Les artistes aiment dénoncer le libéralisme, la société de consommation , l’individualisme, le sort fait aux réfugiés, ils aiment choquer et transgresser , mais pas trop quand même, car ils savent que les collectionneurs et mécènes n’évoluent pas dans ces registres. Abordons alors le cas Pascal Convert. Cet artiste français expose à la galerie Eric Dupont, à Paris (138, rue du Temple), jusqu’au 19 novembre, un panorama photographique en quinze panneaux et 16 mètres de long qui restitue le site de Bamiyan, en Afghanistan , à près de 3 000 mètres d’altitude. C’est là que les talibans, en mars 2001, soit quelques mois avant l’attentat contre les tours jumelles du World Trade Center, à New York, ont détruit deux bouddhas géants (53 m et 38 m) sculptés dans la falaise en grès. Ils ont pillé aussi les 750 grottes autour, dont certaines tapissées de peintures – le site est classé au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Un visage saigné de trous noirs.

L’œuvre de Convert, qui embrasse en noir et blanc une falaise de 1,5 km de large, fascine. La précision optique est folle. Il a fallu pour cela scanner la paroi, collecter 100 000 images avec le concours d’Iconem, une start-up spécialisée dans l’archéologie en zone de guerre. On peut rester une heure devant ce panoramique où la paroi s’apparente à un visage saigné de trous noirs, comme énuclée. Outre que l’œuvre embrasse le site entier, dont les deux niches géantes des bouddhas disparus, à chacun d’y voir l’obscurantisme et la lumière, le vandalisme des talibans visant à nier toute représentation humaine, et donc à rayer toute mémoire, mais aussi de déceler une histoire qui ne s’efface jamais totalement. Ce projet a concouru pour représenter la France à la Biennale de Venise 2017. Il y avait 24 candidats. Pascal Convert est arrivé en finale, face à Xavier Veilhan, artiste qui proposait de transformer le pavillon français en salle de concert. Le jury n’a pu départager les deux finalistes. Les ministres des affaires étrangères (Jean-Marc Ayrault) et de la culture (Audrey Azoulay) ont tranché pour Veilhan. Pour le projet le plus festif et consensuel, celui aussi qui peut « associer des partenaires ». Donc attirer l’argent, ce qui a fait grincer . La galerie Eric Dupont a ensuite proposé Bamiyan pour cette FIAC. Le jury a refusé. Voilà pourquoi ce projet est présenté dans la galerie de la rue du Temple, et non au Grand Palais. Il n’y a rien de scandaleux à ces refus de Venise puis de la FIAC. Juste un symptôme de l’époque. Ne pas retenir une œuvre aussi forte, spectaculaire aussi, qui aurait fait « événement », qui a le soutien du philosophe et historien d’art Georges Didi-Huberman ou de Chris Dercon, l’ancien directeur de la Tate Modern, à Londres, en dit long sur le type de projets qui cadrent avec les grandes fêtes de l’art. Les exactions des talibans, les casseurs de pierre et coupeurs de têtes, ce n’est pas fun. Ça fait peur. L’œuvre de Convert est aussi un travail sur la mémoire qui demande temps et attention. Une œuvre qui plonge dans le passé et parle du présent, à la fois politique et contemplative – c’est rare. Une œuvre transgressive. Trop ?

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Candidature pour le pavillon français de la Biennale internationale d’art de Venise

Commissaire
"Georges Didi-Huberman."

Equipe artistique et scientifique
"Christian Caujolle, Philippe Dagen, Jean-Louis Froment, Olivier Juteau, Sonia Kronlund, Catherine Millet, Eric Poitevin."

Galerie
"Galerie Eric Dupont."

Partenaires institutionnels
"Ambassade de France en Afghanistan, Institut Français d’Afghanistan."

Partenaires privé́s
"Société ICONEM, Société CORNIS, Galaxie Photos."

Producteur artistique
"Société ICONEM, Société CORNIS, Galaxie Photos."



Perdre la mémoire

Les Bouddhas géants sculptés de Bamiyan doivent surtout leur célébrité à leur destruction par les Talibans le 11 mars 2001 suite à un édit condamnant les idoles promulgué le 26 février précédent par le mollah Omar, qui contrôlait l'Afghanistan depuis 1996. A l’époque, le monde occidental n’a pas complètement pris la mesure de cet événement qui pourtant s’inscrit dans une chronologie qui conduit à la destruction des deux tours géantes de New York, sept mois plus tard exactement, le 11 septembre 2001. Aujourd’hui, la liste des destructions de trésors archéologiques par tous les moyens - bulldozers, pioches, marteaux piqueurs, explosifs - par les djihadistes s’est dramatiquement allongée. Citons la destruction des mausolées de Tombouctou par les islamistes d'Ançar Eddine au Mali en juin 2012, celle des vestiges de la Mésopotamie antique par l’organisation Etat islamique (EI) à Mossoul (Irak) où la tombe du prophète Jonas, lieu de pèlerinage, a été dynamitée le 24 juillet 2014 devant la foule et où des milliers de manuscrits rares ont été brûlés (février 2014), les destructions du mausolée Al-Arbaïn et de l’ «église verte» à Tikrit, les destructions de la ville parthe d’Hatra et de l’ancienne cité assyrienne de Nimrud, célèbre pour ses sculptures de taureaux ailés à cinq pattes. Au printemps 2015, la prise de la ville- oasis de Palmyre, ancienne province romaine, cité caravanière au carrefour de la Chine, de l’Inde, de la Perse et de Rome par l’organisation Etat islamique (EI) a fait craindre le pire, pire confirmé le dimanche 23 août 2015 avec la destruction du temple antique de Baalshamin. Quelques jours auparavant, après la destruction de bustes funéraires en place publique, les djihadistes ont décapité au même endroit l’ancien chef des antiquités du site antique, Khaled Al-Assaad, 82 ans. Au nettoyage ethnique de certaines populations (contre les Yézidis et les chrétiens par les djihadistes de Daech en Irak, contre les Hazâras en Afghanistan par la faction des Talibans qui a fait allégeance à l’organisation État islamique), les islamistes ont de longue date ajouté le volet de l’«épuration culturelle», détruisant mais aussi pillant et revendant des antiquités pour financer leur folie meurtrière. La destruction des deux Bouddhas géants à Bamiyan et des Twin Towers à New York a accéléré l'entrée dans le XXIe siècle et nous a appris que le retour des conflits culturels, économiques et surtout religieux irait de pair avec une utilisation toxique de la puissance de synchronicité des images. La mort du commandant Massoud, symbole de la résistance contre l’invasion de l’Afghanistan par l’Union Soviétique (1979-1989), et islamiste modéré qui avait à de multiples reprises attiré l’attention sur la dangerosité d’Al-Quaïda, assassiné dans un attentat suicide mené par deux faux journalistes munis d’une caméra piégée, illustre le rôle destructeur dévolu à l’image. Détruire les images idoles tout en s’en servant pour détruire les idôlatres. Deux Bouddhas géants, deux tours géantes : prise dans une double figure gémellaire en miroir, la conscience du spectateur est médusée et reste enfermée dans une forme aiguë de présent hors de l’histoire. L’objectif premier de l’«épuration culturelle» menée par les extrémistes islamistes n’est autre que de nous faire littéralement perdre la mémoire. Et avec elle notre conscience.



Mémoire meurtrie

Bâmiyân est une petite ville située au centre de l'Afghanistan, dans une vallée étroite culminant à 2500 mètres d’altitude et entourée par les montagnes de l'Hindou Kouch au nord et les montagnes de Koh-i-Baba au sud. Dans la partie nord de l'Hindou Kouch, le bassin de la rivière de l'Oxus s'élargit et le climat y est similaire aux régions sèches de l'Asie centrale. Dans la partie sud, s'est formé le bassin de la rivière de l'Indus dont l’altitude décroît progressivement vers le subcontinent indien. L'Hindou Kouch joue le rôle d'un mur et sépare l'Inde de l'Asie centrale tant au niveau géographique que climatique. Entre les crêtes des montagnes, Bamiyan est situé dans une petite vallée qui s'étend d'est en ouest le long d'une grande falaise faisant face au sud. Cette falaise, faite d’une roche friable, longue d'un kilomètre et demi, a abrité entre le IIIe et le VIIe siècle un monastère bouddhiste qui comptait une population de plus de mille moines. Ce site décrit par les moines Xuanzang (en 629) et Huichao (en 727) était un témoignage majeur de l’école d’art gréco-bouddhique du Gandhara. Sur la falaise, à l'intérieur de niches géantes, se dressaient deux statues colossales de Bouddha-debout, l'une de 38 mètres à l'est, l'autre de 55 mètres à l'ouest. Les plafonds voûtés des niches étaient ornés de peintures murales polychromes dont il ne reste plus rien sinon les relevés effectués par les archéologues qui se sont passionnés pour ce site, Alfred Foucher, André Godard, Joseph Hackin et Zemaryalai Tarzi. On trouve également sur la falaise trois niches plus petites qui abritaient des statues du Bouddha-assis, elles aussi détruites. Outre ces niches, 750 grottes environ ont été creusées dont un dixième environ contenaient des peintures murales et des sculptures en argile que l'on peut désigner sous le terme de grottes- sanctuaires. La destruction (ou le vol) des sculptures a été systématique et les Talibans ont mis le feu dans les grottes ornées, la cendre et les traces de fumée recouvrant peintures et bas-reliefs sculptés. Leur acharnement les a conduits à marquer de l’empreinte de leurs chaussures les voûtes déjà maculées de noir de fumée, pratique utilisée pour avilir un ennemi. Mais signe aussi de la résistance des images à la destruction.



Mémoire malgré tout

A l’occasion du quinzième anniversaire de la destruction des Bouddhas de Bamiyan (11 mars 2016), j’ai été invité par l'Ambassade de France et l’Institut français en Afghanistan à réfléchir à un projet artistique. Dès avant mon départ, j’avais établi une correspondance sensible entre les deux niches géantes vides de Bamiyan et les empreintes négatives des Twin Towers du Mémorial du 11 septembre à New York. La question du double ou plutôt du gémellaire avec cette conscience d’une différence dans l’identique habite mon travail depuis son origine. Et l’absence lui est directement associée. Dans les deux sites, la violence de l’histoire s’inscrit en creux, en négatif, comme si seule la vision du vide pouvait témoigner de la perte, à perte de vue. Saisi dans un vertige, à New York le regard est aspiré vers un point obscur dans lequel fuit le temps, à Bamiyan ce sont des centaines d’ouvertures obscures depuis lesquelles les moines contemplaient les ombres des nuages glissant sur les montagnes enneigées. Intérieur et extérieur, obscurité, lumière et, au-dessus de la falaise, la profondeur de l’horizon. Bien sûr New York est loin de Bamiyan, bien sûr les correspondances entre événements et lieux sont fragiles et peuvent même troubler la lecture de l’histoire. Mais imaginer permet aussi de voir parfois de plus près l’histoire réelle. Près de 3000 personnes sont mortes, tuées par les attentats le 11 septembre à New York. Au mois de février précédent, quelques jours avant la destruction des Bouddhas, un rapport de Human Rights Watch établit que 300 civils hazâras, minorité ethnique de la région de Bamiyan, ont été assassinés. Et dans les faits, il n’existe aucun chiffre indiquant le nombre des victimes civiles durant le régime des Talibans (1996-2001). Ni noms, ni stèles.
Tombeaux éternels, les niches vides des Bouddhas de Bamiyan en témoignent. Mon projet est de poser, exactement à mi-chemin entre New York et Bamiyan, entre l’Afghanistan et les Etats-Unis, à Venise, ville où Marco Polo a ramené un bout de ciel afghan sous la forme d’une pierre, le lapiz-lazuli, qui a servi à recouvrir la façade du palais de la Ca’ d’Oro, et dans le pavillon français, pays qui, à la demande du roi d’Afghanistan, avait ouvert en 1922 à Kaboul la première Délégation archéologique, les fantômes toujours vivants des Bouddhas de Bamiyan. Car si les Talibans ont cru détruire ces statues géantes, de même qu'à Hiroshima après l’explosion de la bombe atomique, il en reste l’ombre portée. Détruire une sculpture, ce n’est pas simplement « casser des pierres » comme a pu le prétendre le mollah Omar, c’est dénier à tout être humain la possibilité de représenter un être vivant. L’acharnement avec lequel les djihadistes en Syrie, en Irak, détruisent les sculptures préislamiques participe bien sûr d’une propagande. Elle témoigne aussi d’une volonté absolue de détruire tout passé, toute histoire. Mais l’explosion des centaines de mines n’a pu détruire totalement l’existence des Bouddhas, il en reste la trace, une empreinte massive.



L’ombre portée des Bouddhas, deux gisants en verre

Localisation : sol de la salle centrale.

Mon projet consiste à placer, tels deux gisants, sur le sol de la pièce centrale du pavillon français, deux blocs parallélépipédiques reprenant au 1/15ème les niches des deux Bouddhas géants mises à l’horizontale. Au fond de chaque niche se trouve la forme fantomatique en relief des Bouddhas. Autour sont installés des blocs de béton réfractaire solidaires d’un plancher porteur qui forment le four de cuisson (voir la description technique de la réalisation dans le document établi par Olivier Juteau, maître verrier). Les côtés du four sont recouverts de plaques en acier d’un noir profond avec des découpes permettant de voir les emplacements des résistances ayant permis la fusion du verre. La niche est remplie de verre incolore jusqu’à sa partie supérieure. En se penchant au-dessus de chaque « four-moule » comme s’il s’agissait d’un puits, au fond, sous le verre, le spectateur pourra découvrir les fantômes de Bamiyan. Une telle masse de verre n’a jamais été coulée de cette manière. La puissance optique du verre, sa profondeur, amplifiera la concentration du regard. J’ai déjà utilisé cette technique de « four-moule » pour la réalisation d’une pièce en verre conservée dans les collections du Musée National d’Art Moderne.



En immersion dans le paysage

Localisation : murs de la salle centrale et des deux premières salles latérales.

De manière dialectique, ces tombeaux, faits d’une masse de verre tourmentée et abstraite, à la fois proches et lointains, symboles de nos temps troublés, seront environnés par, d’une netteté inouïe, une bande photographique géante de la totalité de la falaise. Lors de mon séjour à Bamiyan, il y a une quinzaine de jours, j’ai utilisé une technologie de prise de vue logiquement utilisée pour détecter les micro-fissures dans les pales d’éoliennes. Cette technologie a permis la fabrication d’une image photographique à l’échelle 1 de la falaise par un système de tuilage de 3000 photographies. Il est dans le cadre de ce dossier impossible de rendre compte de l’excitation visuelle produite par ce type d’image : pour l’ouvrir sur un ordinateur, il faut disposer de 5 Terabytes de mémoire vive. L’expérience proposée au spectateur n’est plus celle de noyer son regard dans le verre mais, à l’opposé, grâce à un piqué de l’image d’une précision absolue, de s’immerger dans la matière même de la falaise, la terre, la pierre, la lumière. Contrastant avec l’architecture néo-palladienne de l’extérieur du pavillon, dans la lumière d’été, 750 bouches obscures s’ouvriront devant lui. Et il pourra découvrir que, malgré tout, la falaise continue de vivre. A ce stade de ma réflexion, il me reste à définir avec davantage de précision la hauteur de cette bande. Seul un test grandeur nature permettra de le déterminer de manière définitive. Cette bande se développera dans la salle principale et les salles latérales, à gauche et à droite de celle-ci.



Les enfants de Bamiyan, film

Localisation : salle latérale arrière.

Lors de cette mission, j’ai été très rapidement accompagné par des enfants qui vivent au pied de la falaise et dont les familles ont parfois transformé les anciennes cavernes des moines bouddhistes en habitations. Probablement descendants des soldats de Gengis Khan, ils font partie du peuple hazâra. Méprisés, réduits en esclavage par d'autres ethnies, les Hazâras sont, aujourd’hui encore, l'objet de discriminations régulières. Rapidement, un jeu de « cache-cache » s’est installé entre nous. Dans une extrême proximité, quelques dizaines de centimètres, ils tentaient d’éviter d’être filmés sans pour autant chercher à s’éloigner. Quand la caméra les saisissait, les rires enfantins laissaient place au silence, et, dans un regard d’une dignité d’un autre temps, ils me fixaient. Ni jugement ni recherche d’une complicité. L’être-là dans un paysage, leur paysage. Dans un film dont le récit sera à la première personne, mon projet est d’associer les images tournées il y a quinze jours des enfants de Bamiyan, jouant dans les cavernes ou au football devant les niches des Bouddhas, aux autres prises de vues effectuées par des caméras fixées à des drones ou à des ailes d’avion. La tension entre la présence frontale des enfants et l’abstraction des images aériennes rejouera le dispositif visuel confrontant les masses fantomatiques de verre et les images géantes de la falaise d’une fascinante précision.



Note technique sur la mission menée en Afghanistan du 6 au 17 mars 2016

Convaincu qu’il y avait une forme d’obligation morale à ce qu'un travail artistique réalisé sur le site de Bamiyan soit un apport, même modeste, pour les Afghans et la communauté scientifique, lors de mon séjour j’ai mis en oeuvre des moyens techniques qui ont permis la numérisation de la totalité du site. La société Iconem (http://iconem.com) spécialisée dans le patrimoine et l'archéologie dans les zones de guerre, actuellement à Palmyre, m’a assisté dans ce travail de collecte d’images avec des drones. Les 100.000 photographies réalisées vont permettre la création d’un modèle 3D de la falaise qui sera remis gracieusement aux autorités gouvernementales afghanes et pourra être utilisé par la communauté scientifique des archéologues. J’en conserve cependant les droits d’auteur pour toute utilisation artistique (contrat joint au dossier).



Dossier Complet



Candidacy for the French Pavilion at the 2017 Venice International Art Biennial

Losing our memory

The giant sculpted Bâmiyân Buddhas owe their fame above all to their destruction by the Taliban on 11 March 2001, following an edict condemning idols which was promulgated on 26 Feburary 2001 by Mullah Omar, who had been in control of Afghanistan since 1996. At the time, the western world did not fully take stock of that event, which was nevertheless part of a time sequence which led to the destruction of New York’s giant towers, exactly seven months later, on 11 September 2001. Today, the list of archaeological treasures destroyed by the jihadists by every conceivable means—bulldozers, pickaxes, pneumatic drills, explosives—has become dramatically longer. Let us mention the destruction of mausolea in Timbuktu by Islamists belonging to the Ansar Eddine group in Mali in June 2012; the destruction of vestiges of ancient Mesopotamia by the Islamic State organization (IS or ISIL) at Mosul (Iraq), where the tomb of the prophet Jonas, a place of pilgrimage, was blown up with dynamite on 24 July 2014 in front of a large crowd, and where thousands of rare manuscripts were burnt (February 2014); the destruction of the Al-Arbain mausoleum and the “green church” in Tikrit, Iraq; and the destruction of the Parthian city of Hatra and the ancient Assyrian city of Nimrod, famous for its sculptures of five- legged winged bulls. In the spring of 2015, the taking of the oasis city of Palmyra, an ancient Roman province, and caravan centre at the crossroads of China, India, Persia, and Rome, by the Islamic State (IS) made everybody fear the worst, a worst which was confirmed on Sunday, August 2015 with the destruction of the antique temple of Baalshamin. A few days before that, after the destruction of funerary busts in the public square, in the very same place where the jihadists beheaded the former head of antiquities at that ancient site, Khaled Al-Assaad, aged 82. Long ago, the Islamists added their “cultural purification” operation to the ethnic cleansing of certain populations (against Yezidi and Christians by the Daech jihadists in Iraq, and against the Hazaras in Afghanistan by the Taliban faction which has sworn allegiance to the Islamic State organization), destroying, but also plundering and re-selling antiquities to fund their murderous madness. The destruction of the two giant Bamiyan Buddhas and the Twin Towers in New York accelerated the arrival of the 21st century, and taught us that the return of cultural, economic and above all religious conflicts would go hand in hand with a toxic use of the power of synchronized imagery. The death of Commandant Massoud, symbol of the resistance against the invasion of Afghanistan by the Soviet Union (1979-1989), and a moderate Islamist who had on many different occasions attracted attention to the dangers of Al-Qaeda, and who was assassinated in a suicide attack carried out by two phony journalists carrying a booby-trapped camera, illustrates the destructive role earmarked for images. Destroying idol images while at the same time making use of them to destroy idolators. Two giant Buddhas, two giant towers: caught in a double twin-like mirror figure, the onlooker’s consciousness is dumbstruck and remains confined within an acute form of a present outside history. The primary goal of the “cultural purification” being undertaken by Islamist extremists is none other than to make us literally lose our memory. And with it our consciousness.



Wounded Memory

Bâmiyân is a small town situated in the middle of Afghanistan, in a narrow valley rising to an altitude of 2500 metres/8200 feet and surrounded by the mountains of the Hindu Kush to the north and the Koh-i-Baba mountains to the south. In the north part of the Hindu Kush, the basin of the Oxus river broadens out and the climate here is similar to the dry regions of Central Asia. In the south part lies the basin of the Indus river, whose altitude gradually drops down towards the Indian subcontinent. The Hindu Kush plays the part of a wall and separates India from Central Asia, both geographically and climatically. Set between mountain ridges, Bamiyan lies in a small valley which runs from east to west along a large, south- facing cliff. Between the 3rd and 7th centuries, this cliff, made of a brittle rock and a mile or so long, was the site of a Buddhist monastery with a population of more than 1000 monks. This site, described by the monks Xuanzang (in 629) and Huichao (in 727), was a major example of the Gandhara school of Graeco-Buddhist art. In the cliff, inside giant niches, stood two colossal statues of standing Buddhas. One 38 metres/125 feet tall to the east, the other 55 metres/180 feet tall, to the west. The vaulted ceilings of the niches were decorated with polychrome wall paintings, of which nothing remains except the plans made by archaeologists with a deep interest in this site, namely Alfred Foucher, André Godard, Joseph Hackin and Zemaryalai Tarzi. In the cliff there are also three smaller niches which once housed statues of Buddha seated, likewise now destroyed. In addition to these niches, some 750 caves were hewn out, about a tenth of which used to contain wall paintings and clay sculptures, which we may describe by the term ‘sanctuary caves’. The destruction (or theft) of the sculptures was systematic and the Taliban set fire to the decorated caves, with the result that ashes and traces of smoke covered paintings and sculpted bas-reliefs. Their crazed determination led them to mark the vaults already smudged with black fumes with the imprint of their shoes, a practice used to debase an enemy. But also a sign of the images’ resistance to destruction.



Memory in spite of everything

For the 15th anniversary of the destruction of the Bamiyan Buddhas (11 March 2016), I was invited by the French Embassy and the French Institute in Afghanistan to come up with an artistic project. Before my departure, I had established a perceptible link between the two empty giant niches of Bamiyan and the negative imprints of the Twin Towers at the 11 September Memorial in New York. From the outset, my work has been informed by the question of the double or rather the twin, with an awareness that there can be a difference in identical things. And absence is also directly linked with it. In these two sites, the violence of history is implicitly incorporated, in the negative, as it were, as if only a vision of the void could illustrate loss, as far as the eye can see. In New York, the eye is gripped by something dizzy-making, and drawn towards an obscure point into which time flees; at Bamiyan, there are hundreds of dark openings from which the monks once contemplated the shadows of clouds gliding over snow-clad mountains. Inside and outside, darkness and light, and, above the cliff, the depth of the skyline. Needless to say, New York is a long way from Bamiyan, and, needless to say, links between events and places are fragile and can even confuse the way history is read. But imagining things also sometimes makes it possible to take a closer look at real history. Almost 3,000 people were killed in the 11 September attacks in New York. In the previous month of February, a few days before the destruction of the Buddhas, a Human Rights Watch report stated that 300 Hazara civilians, an ethnic minority in the Bamiyan region, had been murdered. And in these facts there is no figure indicating the number of civilian victims during the period of Taliban rule (1996-2001). No names, no steles.
Like eternal tombs, the empty niches of the Bamiyan Buddhas attest to all this. My project involves placing the still very much alive ghosts of the Bamiyan Buddhas exactly halfway between New York and Bamiyan, between Afghanistan and the United States, in Venice, the city to which Marco Polo brought back a small patch of Afghan sky in the form of a stone, lapis lazuli, which was used to cover the façade of the Ca’ d’Oro, and specifically in the French pavilion, a country which, at the request of the king of Afghanistan, had opened the first archaeological Delegation in Kabul in 1922. For if the Taliban thought they had destroyed those giant statues, the shadows cast by them still remain, just as they did in Hiroshima after the explosion of the atomic bomb. Destroying a sculpture is not merely “breaking stones”, as Mullah Omar claimed, it is to deny any human person the possibility of depicting a living being. The fierce enthusiasm with which jihadists in Syria and Iraq destroy pre-Islamic sculptures is, needless to say, part and parcel of a propaganda machine. It also illustrates an absolute desire to destroy all of the past, and all of history. But the explosive power of hundreds of mines was unable to completely destroy the existence of the Buddhas—their trace remains, like a massive imprint. Mais l’explosion des centaines de mines n’a pu détruire totalement l’existence des Bouddhas, il en reste la trace, une empreinte massive.



The Shadow Cast by the Buddhas, Two Recumbent Figures Made of Glass

Location: the floor of the central room.

My project consists in placing on the floor of the central room in the French Pavilion two parallelepiped blocks, like two recumbent statues, reproducing, in 1/15th of their real size, the niches containing the two giant Buddhas, laid horizontally. At the back of each niche we find the ghostlike form of the Buddhas, in relief. All around are installed refractory concrete blocks, set together and creating a load- bearing floor, which form the kiln (see the technical description of its production in the document drawn up by Olivier Juteau, a master glass-maker). The sides of the kiln are covered with dark black steel sheets with areas cut out, making it possible to see the placing of the resistances permitting the melting of the glass. The niche is filled with colourless glass to its upper part. When spectators lean over each “kiln-mould” as if it were a well, at the bottom, under the glass, they will discover the ghosts of Bamiyan. A glass mass of this size has never been cast before in this way. The optical power of the glass, and its depth, will magnify the eyes’ concentration. I have already used this “kiln-mould” technique for the production of a glass piece held in the collections of the National Museum of Modern Art.



Delving into the Landscape

Location: walls of the central room and the first two side rooms

In a dialectical way, these tombs, made of a mass of twisted and abstract glass, at once near and far, symbols of our troubled times, will be surrounded by a huge and amazingly distinctly defined photographic strip of the entire cliff. During my stay in Bamiyan, a fortnight ago, I used a photographic technology which is logically used to detect micro-fissures in the blades of wind turbines (http://web.cornis.fr/fr). This technology enabled me to manufacture a 1:1 photographic image of the cliff using a tiling system involving 3000 photographs. Within the limits of this dossier it is impossible to describe the visual excitement produced by this type of picture: to open it in a computer you need five Terabytes of live memory. The experience being offered to viewers is no longer that of drowning their gaze in the glass but, conversely, thanks to the sharpness of the image with its absolute precision, one of becoming immersed in the very matter of the cliff, earth, stone, and light. Contrasting with the neo-Palladian architecture of the Pavilion’s exterior, in the summer light, 750 dark mouths will open up in front of the spectators. And they will discover that, in spite of everything, the cliff is still alive. At this stage in my thinking, I still have to define the height of this strip with greater precision. Only a life-size test will make it possible to work it out in a definitive way. This strip will be in the main room and in the side rooms, to the left and right of the main room.



The Children of Bamiyan, Film

Location: rear side room.

On this mission, I quickly attracted a following of children who live at the foot of the cliff , whose families have in some cases turned the old caves of the Buddhist monks into dwellings. They are probably descendants of the soldiers of Genghis Khan, forming the Hazara people. The Hazaras are looked down upon, reduced as they are to slavery by other ethnic groups, and they still suffer regular discrimination. In no time there was a game of hide-and-seek between us. At extremely close quarters, just a foot or two apart, they did their best to avoid being filmed, but without trying to run away. When the camera did catch them, their childish laughter gave way to silence, and they would stare at me through eyes that had the dignity of another age.. There was neither judgement nor any quest for complicity. Just being-there in a landscape—their landscape. In a film whose narrative will be in the first person, my project involves associating pictures taken of the children of Bamiyan, playing in the caves and kicking a football in the Buddhas’ niches, with other shots of this site taken by cameras mounted on drones and airplane wings. The tension between the frontal presence of the children and the abstraction of the aerial images will re-enact the visual arrangement comparing the ghostlike masses of glass and the gigantic images of the cliff with a fascinating precision.



Technical Note on the Mission Conducted in Afghanistan from 6 to 17 March 2016

Firmly persuaded that there was a sort of moral obligation for an art work produced at the Bamiyan site to be an albeit modest contribution to the Afghan people and the scientific community, during my stay I made use of technical methods which permitted the digitization of the complete site. The Iconem company (http://iconem.com) , specializing in patrimony and archaeology in war zones, currently in Palmyra, helped me in this task of image collection using drones. The 100,000 photographs produced will make it possible to create a 3D model of the cliff which will be given to the Afghan government authorities free of charge, and the scientific community of archaeologists will be able to make use of it. I am nevertheless holding on to the rights for any artistic use (contract attached to the dossier).



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